Service national

Ah le service militaire ! Une époque que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître !

Jourdan-Debrel

Le service militaire en France voit le jour grâce à la Révolution. Appelé « Conscription Universelle et Obligatoire » dans la loi Jourdan-Delbrel qui l’encadre, ce service rendu à la nation précise que tout français est soldat et se doit à la défense de la patrie. La durée sera alors fixée à 5 ans pour tous les hommes âgés entre 20 et 25 ans.

Au début du 19ème siècle, un décret impérial met en place le tirage au sort. Ce qui permet d’agrandir les troupes de Napoléon. Il y aura même un « principe de remplacement » pour les nobles et la bourgeoisie. On peut dès lors négocier une certaine somme d’argent pour payer un remplaçant qui effectuera le service à la place de son fils.

Charles de Freycinet

La durée et l’âge changerons ensuite selon les époques et les besoins.
La présence sous les drapeaux passera à 6 ans, puis sera de nouveau fixée à 5 ans à la fin du 18ème siècle, pour finir à 3 ans avec la loi Charles de Freycinet, dite « loi des curés sac au dos » car désormais le clergé doit servir également sous les drapeaux.

Maurice Berteaux

Au début du 20ème siècle, la durée du service militaire est fixé à 2 ans. La loi Berteaux supprime le tirage au sort, les remplacements, ainsi que les exemptions. Tous les hommes peuvent être appelés pour un service personnel, égal et obligatoire.
Cette loi rétablit le principe d’égalité de tous devant le service militaire et deviendra la loi fondatrice du service militaire durant le XXe siècle.

Plusieurs décrets imposeront le service militaire aux colonies françaises. Les algériens pour une durée de 3 ans, puis 7 ans dans la réserve. Pour les tirailleurs sénégalais, la durée sera fixée à 4 ans.
En 1913, le service repasse à 3 ans.
En 1923, il repasse à 18 mois et voit les premières préparations militaires destinées notamment à déceler et sélectionner des officiers du contingent.
La durée rechange à nouveau et repasse à 1 an (en 1928) puis revient à 2 ans (en 1935)

En 1946, le service national dure 1 an puis, 4 ans plus tard en 1950, se voit porter à 18 mois. Durant la guerre d’Algérie, il sera maintenu à 30 mois.

En 1963, on ramène sa durée à 16 mois et les notions d’objecteur de conscience et de scientifiques du contingent voient le jour.

Pierre Messmer

Il faudra ensuite attendre 1965 avec la loi Messmer, pour que le service ne soit plus « militaire » mais « national ». Il y aura alors 4 formes de service national : un service militaire, un service de défense, un service de coopération dans un pays étranger et un service d’aide technique dans les DOM-TOM.
En 1970, le service national dure 1 an et est accessible aux femmes volontaires. Il est possible d’effectuer son service dans la Gendarmerie Nationale.

Au début des années 80, il devient possible de reporter son incorporation jusqu’à 22 ans, pratique pour finir les études. Et on peut faire un service national civil dans la Police Nationale.

Pierre Joxe

A partir de 1992, le service national passe de 12 mois à 10 mois grâce à la loi Joxe. Celle-ci permet également d’effectuer un service de sécurité civile.




Jacques Chirac

Avec la chute du bloc de l’est, la France réfléchie à réformer sa défense en remplaçant le conscription par une armée professionnelle.
En 1996, le président Chirac met en place un grand débat national. La transition entre l’armée composée d’appelés et l’armée professionnelle devrait prendre 6 ans.
En 1997, le service national est suspendu – mais pas supprimé.
A la place, on a les JAPD, Journées d’Appel de Préparation à la Défense.
En 2002, la conscription est totalement suspendue. La France possède une armée entièrement professionnelle.

Comment se passe le service national dans les années 80/90 ?

Ça commence par « les 3 jours » – en réalité 1 journée – où le jeune français passe quelques tests psy et une visite médicale pour voir s’il est apte à faire son service national. Des techniques pour se faire réformer s’échangeront durant des années, de génération en génération. Avec plus ou moins de succès !

Vient ensuite la lettre d’incorporation. Un courrier qui en a traumatisé plus d’un !
Pour une affectation en France, c’est relativement simple. On connait ses régions et les garnisons sont facilement identifiables. Et généralement, on a dans son entourage un cousin ou un voisin qui a fait son service dans la même caserne. Et il est facile d’estimer la durée du voyage jusqu’à son affectation. Essentiel pour les futures permissions.
Pour les autres, comme par exemple, le service effectué en Allemagne, il faut se rabattre sur le dico pour trouver la ville !
Pour l’Outre-mer ou la Marine, on se dira que les voyages forment la jeunesse… Mais bon, passer son année au service de la France dans le Pacifique, il y a pire !

Après un voyage en train plus ou moins long, on est accueilli à la caserne pour débuter 2 mois de classe. Dans les années 80, on effectue ses classes en treillis M64 ou F1, casque lourd modèle 51 et « brelages » en cuir. Le FSA pour Fusil Semi-Automatique nous fera découvrir les joies du tir.

Fusil Semi-Automatique (MAS 49 modifié 56)
Lance-Roquette Anti-Char modèle F1

Après 2 mois de classe où on vous apprend à marcher au pas, tirer au fusil, cirer vos rangers, mettre votre lit en batterie, porter le béret, boire de la bière au foyer, monter la garde, j’en passe, et des meilleurs ! On vous affecte à une compagnie. Finie donc la compagnie d’instruction et la FETTA (pour Formation Elémentaire des Techniques Toutes Armes). Vous n’êtes plus un « bleu bite ». Vous êtes sapeur, chasseur, fantassin ou artilleur selon l’arme…
Pour les plus doués, le PEG (peloton d’élèves fradés) ou le PESO (peloton d’élèves sous-officiers) vous ouvre les portes du saint grade. Certains seront caporal ou brigadier, d’autres sergent ou maréchal des logis. Toujours selon l’arme.
Les autres resteront bidasses. Avec toutefois des spécialités hautement techniques comme par exemple tireur LRAC ou pilote de MPG.

Moyen Polyvalent du Génie (MPG)

Le service militaire, détesté quand on le fait, devient un réservoir d’anecdotes des années plus tard. Questionnez ceux qui l’ont fait, ils auront toujours une histoire à raconter.

Selon les casernes, les appelés logent principalement dans des chambres de 8 avec comme seul mobilier, 1 lit, 1 tabouret, 1 armoire chacun et une table pour 6 (?) Sur le lit, le couchage en batterie. Dans l’armoire, le paquetage et les affaires civiles.

Le paquetage, perçu à l’incorporation (oui à l’armée on perçoit. On perçoit un paquetage, son armement, son équipement, etc. ) se composait généralement de 2 tenues de combat, 1 tenue de sport, 1 tenue de défilé, le nécessaire pour manger (couverts, gamelles, gourdes) 1 casque, des rangers, une brosse et du cirage, une trousse à couture, un poncho, une demi-tente (à partager avec son binôme) une casquette, un béret, des brelages (on dit bretelles de suspensions !) une pucelle, etc.
Le tout devait tenir dans un sac à dos et une musette (F1 puis F2)

En manœuvre, sur le pas de tir, pendant les marches, avec sac à dos et Famas et, pour les plus chanceux, lorsque vous montez la garde dans un dépôt de munitions.

Le casque F1 remplace le casque Modèle 51, composé du casque léger, sur lequel on pose le casque lourd – ou « la casquette en peau de locomotive ».

Par rapport à ce dernier, c’est une très bonne évolution. D’abord pour le confort. La coiffe est entièrement réglable par des sangles velcro. Seuls les premiers modèles feront un peu mal à la tête à cause d’un fond de casque rond. La forme en étoile sera plus appréciée.
Toujours pour le confort, on notera l’apparition d’une mentonnière qui évitera de s’étrangler avec la jugulaire du modèle 51.

Côté efficacité, le casque F1 reprend les même caractéristiques : acier au manganèse de 1,2 mm d’épaisseur. Bref, ça protège des éclats mais pas forcément des balles.

Le casque est en dotation au début des années 80. Il y aura plusieurs versions, notamment au niveau de l’attache de la jugulaire. D’abord avec un crochet, puis des pressions, du velcro, et des boucles en cuir sur la version Gendarmerie.

Côté accessoires, le casque F1 est livré avec un filet de camouflage 2 tons – la fameuse « salade ». En fait, le même filet fournit avec le casque modèle 51. Donc on retrouvera sur le terrain pas mal de soldat avec un bout de chambre à air, un élastique ou un joint de portières pour maintenir cette salade en place.

Dans certaines unités, on utilisera également la capuche de la veste M64 comme couvre-casque. De toute façon, on avait pas le droit de mettre la capuche !

Quand la guerre du Golfe éclate. On fabrique en quantité des couvre-casques camouflage désert. Il sera décliné ensuite en camouflage Centre Europe avec jonc.

Maintenant que vous en savez un peu plus sur ce casque mythique, vous pouvez partir au combat. Et qui dit combat, dit trou de combat !

Rappelez-vous, à moins de faire partie de la section de commandement ou être le conducteur du capitaine, vous l’avez utilisé au moins une fois pendant le service : la pelle US. Vous savez, celle qui vous rentre dans le postérieur quand on se baisse trop vite !

La pelle US ou pelle-pioche est donc l’outil indispensable au fantassin, mais aussi au sapeur, au chasseur, même au mécano. On a toujours besoin de creuser. Son trou de combat mais également la petite rigole autour de la tente ou son petit trou à l’abri des regards.
Grâce à un bague de serrage, on peut l’utiliser comme une pelle, une pioche, voire un tabouret.

Preuve également que cet outil est essentiel à la vie en campagne, l’armée suisse, l’armée belge, pour ne citer qu’elles, possèdent leur version.

La version française se reconnait grâce aux 2 reliefs. L’US utilisée pendant la seconde guerre a une lame lisse.

Bon maintenant que vous êtes au fond de votre trou, casque sur la tête, à l’abri dans votre poncho – qui servira aussi de tapis de sol sous la tente, il vous manque un peu de lumière.

Heureusement, à l’armée, on avait une TL !

La lampe torche de l’armée, assez puissante pour attirer un moustique astigmate !

Le modèle français se reconnait grâce aux logos des Transmissions et du nom en relief avec les lettres Fr

C’est une lampe qui a fait ses preuves même si elle n’éclaire pas autant que les lampes et autres torches civiles.
D’ailleurs son but n’était pas d’être vu mais de voir sans être vu !
D’où l’allongement du pare-soleil, la présence de filtres dans le magasin sous les piles.

La lampe fonctionne avec 2 piles LR20 (ou NBA 30 pour les nostalgiques)
Elle a une ampoule de rechange sous le ressort des piles.

Pour compléter la tenue et porter ses quelques accessoires, le soldat est équipé également d’un ceinturon et d’un brelage (on dit bretelles de suspension, le brelage c’est pour les ânes !!!)
Un système ingénieux, s’il en faut, pour porter : la lampe, les portes-chargeurs, la gourde, la pelle, la trousse de nettoyage, l’ANP (Appareil Normal de Protection – le masque à gaz en fait…), la baïonnette…

Et détail important, on passe les bretelles sous les pattes d’épaules ! Sinon, 10 pompes.

Ah les punitions à l’armée… pour la forme, des pompes… pour le fond, du trou. Le trou ou le gniouf, c’est la prison de la caserne. On y passe ses nuits mais la journée, on participe aux activités avec les autres soldats. Donc qui dit trou, dit : pas de permissions, pas de quartier libre. Vous savez ? Le moment où après le repas du soir, on se changeait en civil pour aller boire une bière en ville ?

On n’oublie pas non plus l’ordinaire – en fait, un réfectoire où ce que l’on mange est très ordinaire… Bataille de petits suisses en perspective… De toute manière, on sera affecté à la plonge et au nettoyage chacun son tour…

Car oui, à l’armée, on apprenait aussi à nettoyer. Tous les matins, TIG (Travaux d’Intérêts Collectifs) ou TBC (Travaux de Biens Collectifs) selon l’époque. Une manière de respecter les autres. Si je salis, mon tour viendra où je devrais aussi passer le balai et récurer les toilettes !

Pour finir, car tout a une fin, surtout avec le service national. On se confectionnera une quille car on deviendra enfin « libérable ». On fêtera le « Père Cent » au foyer, ce qui signifie qu’il reste 100 jours à faire à la caserne.

Certains, feront du Rab à cause d’un séjour au gniouf. D’autres renouvelleront la même période (6 ou 12 mois de service national en plus) Ils deviendront alors VSL (pour Volontaire Service Long) Généralement, ils grimperont dans la hiérarchie et seront l’exemple à suivre dans la compagnie. Voire aussi pro que l’encadrement. D’ailleurs la plupart s’engageront !

Voilà, vous en savez un peu plus sur le service militaire. Si vous voulez savourer des anecdotes, posez des questions à votre entourage. Vous connaissez forcément quelqu’un qui a passé son service militaire à ne rien faire, planqué dans un bureau mais également un ancien bidasse qui a fait une manœuvre avec des américains et des canadiens en Allemagne par -29° C dans la forêt noire…

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